Retrouver des "prisons dignes" et renforcer les alternatives à l’incarcération

Promesse non tenue

Promesse non tenue de François Hollande

La réforme pénale de Christiane Taubira n'apas permis d'atteindre ces objectifs très ambitieux. Cette réforme a d'abord fait l'objet d'une vive passe d'armes entre les anciens ministres de la Justice et de l'Intérieur, Christiane Taubira et Manuel Valls, dès l'été 2013. Le second s'opposait notamment à la suppression des peines planchersAu terme d’une ultime réunion d’arbitrage, le 30 août, François Hollande et Jean-Marc Ayrault ont tranché en faveur de leur suppression, de la mise en place d'une “peine de contrainte pénale” (probation), de l'allocation de moyens supplémentaires, et de la restriction des aménagements de peine pour équilibrer la réforme.

La réforme a été officiellement présentée en Conseil des ministres le 9 octobre. Cependant, elle ne sera pas débattue au Parlement avant les municipales, en mars 2014, a prévenu début septembre l'ancien ministre chargé des Relations avec le Parlement, Alain Vidalies. Le 31 août, Christiane Taubira, l'ex-ministre en charge de la réforme, avait pourtant assuré que laisser passer les municipales "serait non seulement de l'irrespect envers nos concitoyens, mais une faute éthique et une erreur politique".

La réforme pénale qui devait être débattue à l’Assemblée nationale dès le 14 avril 2014, sera finalement repoussée "de quelques semaines", a déclaré Christiane Taubira, le 3 avril 2014, avant que Manuel Valls n'assure que le débat aura lieu en juin.

L'arrivée du texte au Parlement

Christiane Taubira a défendu le texte devant la commission des Lois de l'Assemblée nationale le 26 mai 2014. La réforme crée une nouvelle peine exécutoire en milieu ouvert et doit éviter les sorties "sèches" de prison.

Ce projet de loi ne vise pas à supprimer ni à remplacer la prison. L'échelle des peines est là. il s'agit d'enrichir l'arsenal répressif qui est mis à la disposition des juges

Les députés de la commission ont amendé le texte et voté :

  • un élargissement la peine de "contrainte pénale" applicable à tous les délits, et pas uniquement aux délits passibles de 5 an de prison maximum
  • la possibilité au juge d'application des peines de convertir une peine de prison inférieure à un an en contrainte pénale
  • un examen obligatoire de mesures d'aménagement des peines pour les peines de moins d'un an, et non pas de moins de six mois pour les récidivistes, comme le projet de loi le prévoyait

l'abrogation des peines plancher pour les récidivistes. Instaurée en 2007 par le précédent gouvernement, les peines plancher pouvaient s'appliquer aux majeurs comme aux mineurs. Les députés ont également adopté la contrainte pénaleCinq jours plus tard, l'Assemblée nationale, adopte le projet de réforme pénale par 328 voix pour et 231 contre.

Le Sénat adopte à son tour le texte le 26 juin. Il fait de la contrainte pénale la peine principale pour toute une série de délit n'impliquant pas la violence aux personnes. 

Le texte doit désormais faire l'objet d'une commission mixte paritaire (7 députés et 7 sénateurs chargés de trouver une version commune aux deux chambres).

Le projet final

Réunie le 8 juillet, la commission mixte paritaire (CMP) décide :

  • que les peines plancher sont supprimées ;
  • que la contrainte pénale est créée et pourra s'appliquer aux délits punis d'une peine d'emprisonnement d'un maximum de cinq ans, avant d'être étendue à tous les délits au 1er janvier 2017 ;
  • de la possibilité d'aménager les peines des condamnations de deux ans, ou d'un an pour les récidivistes, est maintenue ;
  • que le recours aux écoutes et à la géolocalisation sera finalement réservé aux plus graves infractions, comme celles soumises à enquêtes judiciaires ;
  • que le suivi des personnes sous contrainte pénale sera réservé, après jugement, aux services pénitentiaires d'insertion et de probation, et non pas partagé avec les associations

La réforme pénale est définitivement adoptée le 17 juillet par le Parlement. Des élus UMP ont saisi le Conseil constitutionnel, qui a finalement validé le texte le 7 août, mais l'application du texte à partir du 1er octobre pourrait pourtant être problématique. Certains magistrats voient une incertitude juridique persistante qui pourrait dissuader les juges de prononcer cette nouvelle peine. 1 000 embauches dans les services pénitentiaires d'insertion et de probation sont prévues sur trois ans, dont 300 dès le mois d'octobre, pour le suivi des condamnés.

Flop de la réforme 

Deux ans après son entrée en vigueur, les juridictions ont prononcé 2 287 contraintes pénales, alors que l’étude d’impact en prévoyait 8 000 à 10 000 chaque année, relève L'Opinion. La contrainte pénale pèse pour 0,35 % des peines prononcées, poursuit le quotidien. Considérée trop proche du sursis avec mise à l’épreuve (SME) par certains magistrats ou encore trop chronophage à mettre en place, la mesure de Christiane Taubira est passée à côté de ses ambitions. 

Au 1er décembre 2016, plus de 69 000 personnes étaient incarcérées dans les prisons françaises, pour un peu plus de 58 000 places opérationnelles, selon les chiffres de l'Administration pénitentiaire. Le nombre de matelas au sol à, lui, augmenté de 47,5% sur un an.

Type de promesse : Engagement écrit de campagne

Mots-clés : prisoncarcéralpénitentiairedétenusréforme pénale