Lutter contre le « délit de faciès » lors des contrôles d’identité avec une nouvelle procédure respectueuse des citoyens

Promesse non tenue

Promesse non tenue de François Hollande

Pour répondre à cet engagement, le gouvernement s'est contenté d'une révision du code de déontologie des forces de l'ordre. Un effort louable mais qui ne permet pas de garantir une "nouvelle procédure plus respectueuse des citoyens".

La circulaire

Annonce abandonnée de Manuel Valls

La circulaire promise par l'agenda du changement n'a jamais plus été évoquée.

Le récépissé

Annonce abandonnée de Manuel VallsLa promesse de lutte contre le délit au faciès devait ensuite appliquée sous la forme d'un récépissé lors des contrôles, selon Jean-Marc Ayrault, avant un recul de Manuel Valls.

Le 16 octobre 2012, dans son "rapport relatif aux relations police/citoyens et aux contrôles d'identité", le Défenseur des droits Dominique Baudis estime que la solution des récépissés "réduit mécaniquement le nombre de contrôles abusifs", mais qu'elle ne règlait pas le problème de fond des contrôles discriminatoires.

Le code de déontologie et le matricule

Promesse en cours de réalisation de Manuel Valls

Manuel Valls s'en remet alors à une révision du code de déontologie des forces de l'ordre de 1986, qui sera commun à la police et à la gendarmerie. Proposé par le ministère de l'intérieur en décembre 2012, il a été approuvé après amendements par le conseil de la fonction militaire de la gendarmerie en février 2013 et les syndicats de police (hors Alliance) en mars.
  • La possibilité d'identification des fonctionnaires avec un numéro administratif propre à chaque fonctionnaire (plutôt qu'avec un matricule)
  • L'interdiction des contrôles au faciès

Le nouveau code est entré en vigueur le 1er janvier. En 33 articles, il rappelle les principes de "probité", d'"obéissance" et du "droit de réserve" auxquels sont soumis policiers et gendarmes placés sous l'autorité de l'intérieur. Un chapitre entier du code est désormais "consacré aux relations entre le service public et les citoyens" :

  • Les palpations de sécurité conduites à l'occasion de contrôles d'identité sont encadrées pour la première fois : elles sont réservées aux cas pour lesquels policiers et gendarmes la considèrent "nécessaire à la garantie de [leur] sécurité" ou "celle d'autrui". Elles doivent être pratiquées "à l'abri du regard du public" chaque fois que c'est possible.
  • Contre le délit de faciès, le code précise que "le contrôle d'identité [...] ne se fonde sur aucune caractéristique physique ou aucun signe distinctif pour déterminer les personnes à contrôler sauf s'il dispose d'un signalement précis motivant le contrôle"
  • Il préconise l'utilisation du vouvoiementdéjà évoquée par Manuel Valls
  • Il demande aux forces de l'ordre d'être identifiables lors des contrôles, en référence au matricule que portaient autrefois les policiers. Le retour du matricule avait été encouragé par Dominique Baudis, refusé par les syndicats de policiers qui le jugeaient "stigmatisant", puis annoncé pour l'automne 2013 par Manuel Valls.

Les autres pistes abandonnées

Annonce abandonnée de Manuel Valls

D'autres solutions de remplacement ont été envisagées par Manuel Valls, comme la mise en place de petites caméras qui filmeraient les interventions ou encore la remise d'une "carte de visite" (qui à la différence d'un récépissé ne nécessite pas la création d'une base de données). 

Le rapport de Dominique Baudis évoquait d'autres axes :

  • Tout nouveau "dispositif de régulation des contrôles" doit être préparé minutieusement et expérimenté avant sa généralisation
  • Organiser le cadre d'un dialogue permanent entre forces de sécurité et acteurs de la société civile pour recenser les bonnes pratiques et expérimenter de nouvelles pistes

Le délit de faciès et la justice

En attendant, 13 personnes qui avaient assigné l'Etat pour des contrôles au faciès jugés abusifs ont été déboutés par le tribunal de Paris le 2 octobre 2013. Lors de l’audience le 3 juillet, l’un des avocats des plaignants, Me Félix de Belloy, avait espéré que le « sursaut » vienne de la justice, alors que les mesures politiques se font attendre. "Il est temps que la République prenne la mesure et la conscience de ce que sont les contrôles d’identité pour une partie de la population", avait-il plaidé. Les 13 plaignants ont fait appel de cette décision.

L’avocate de l’Etat, Me Claire Litaudon, avait rétorqué qu’il ne revenait pas au tribunal de statuer sur cette question, mais au législateur. Selon elle, dans chacun des 13 cas soumis au tribunal, "le contrôle a une justification" et "l’État peut démontrer" qu’il n’est "pas discriminatoire". Le même jour, des députés de la majorité ont indiqué vouloir publier un communiqué appelant le gouvernement à des mesures sur le sujet.

Dans cette affaire, l'Etat a été condamné par la Cour d'appel de Paris pour faute lourde, le 24 juin 2015. Pour la justice, 5 des 13 cas de contrôles de police qui lui étaient soumis relèvent d'une faute lourde pour délit de faciès. Condamné à verser 1 500 euros de dommages et intérêts aux 5 victimes, l'Etat s'est pourvu en Cassation en octobre 2015

Selon les informations de Mediapart, l'Etat, dans un mémoire intitulé "l'agent judiciaire de l'Etat", justifie le recours au contrôle au faciès par les forces de l'ordre. "La cour d’appel ne pouvait alors dire que les services de police judiciaire avaient commis une faute lourde établie par le contrôle (...) de la seule population dont il apparaissait qu’elle pouvait être étrangère, sans rechercher si ce contrôle n’était pas justifié par l’objet de la réquisition en exécution de laquelle il était réalisé" rapporte le site d'information en ligne.

Des pratiques qui peinent à changer ?

Selon un sondage OpinionWay publié le 9 mai 2014 et commandé par trois associations (Open Society Justice Initiative, Graines de France et Human Rights Watch), 60% des Français estiment que le gouvernement n'a pas pris de mesures concrètes pour la lutte contre le délit de faciès. L'étude montre également que les contrôles d'identité, au cours des 12 derniers mois, ont concerné :

  • Près de 10 % des Français sans ascendance étrangère (contrôlés en moyenne 1,85 fois)
  • 17,4% des Français ayant des ascendants originaires d'Afrique du Nord (contrôlés en moyenne de 8,18 fois)

Ces associations jugent les mesures politiques insuffisantes et réclament un changement de législation ou l'utilisation de mini-caméras lors des contrôles.

Une loi rejetée à l'Assemblée nationale

Dans le cadre de la réforme pénale, des députés PS souhaitaient l'instauration de récépissés dans les contrôles de police. Mais la Chambre basse a rejeté cet amendement, 25 députés du Parti socialiste votant contre cette proposition de loi.

Calendrier en retard

La circulaire devait être envoyée avant le 29 juin 2012, selon l'agenda du changement de François Hollande. Comme il l'avait promis le 11 juillet 2012, Manuel Valls a rendu son arbitrage après la remise du rapport de Dominique Baudis, le 17 octobre 2012.

Type de promesse : Projet présidentiel

Mots-clés : contrôle au facièspoliceracismedélit de facièscontrôles de policematricule