Mise en place d'une grande loi signant l'acte deux de l'exception culturelle française et remplaçant Hadopi

Promesse partiellement tenue

Promesse partiellement tenue de François Hollande

Une mission de concertation sur les contenus numériques et la politique culturelle à l'ère du numérique a été constituée par le gouvernement le 16 juillet 2012. Le rapport Lescure, maintes fois reporté, a finalement été remis à Aurélie Filippetti le 13 mai 2013.

La loi sur la création culturelle

Promesse en coursLe 17 octobre 2013, la ministre a annoncé la présentation de la grande loi sur la création avant Noël, et son vote avant les municipales 2014.

Dans un entretien accordé à Libération, le 23 janvier 2014, la ministre de la Culture, Aurélie Filippetti détaille sont projet de loi sur la création culturelle. Elle y annonce que :

La liberté de création sera inscrite dans un texte législatif. La place pour les artistes sera reconnue et renforcée. Et cela dans tous les domaines, aussi bien dans le spectacle vivant que dans les arts plastiques. Ainsi, par exemple, les collections des Fonds régionaux d’art contemporain seront dotées d’un statut.

Pour autant, Aurélie Filippetti assure qu’il n’y "aura pas de transfert de compétence" de l’Etat au profit des collectivités territoriales. En ce qui concerne le volet Hadopi de la loi, "le CSA sera donc chargé de la réponse graduée", mais pas question pour autant de réguler les contenus internet. Selon la ministre, la consultation interministérielle devait être engagée fin janvier, puis présentée au Conseil des ministres au printemps.

En raison de l'embouteillage législatif, la loi s'enlise et les divergences politiques compliquent le transfert des compétences de la HADOPI au CSA. Le 20 juillet 2014, Aurélie Filippetti relance pourtant le projet, annonçant une loi en deux volets - création et patrimoine - pour le début de l’année 2015.

Le projet est repris par sa successeure Fleur Pellerin. La loi relative "à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine" est promulguée le 7 juillet 2016, sans que soit mentionné un transfert des compétences de la Hadopi au CSA. 

La fin de la Hadopi ?

Fin de la coupure d'Internet

Promesse tenue d'Aurélie FilippettiLe 20 mai 2013, Aurélie Filippetti annonce que la première mesure d'enterrement de la Hadopi, la suppression de la coupure d'Internet, serait effective en juin. Un délai qui n'a pas été tenu, puisque le décret actant cette suppression a été publié le 8 juillet 2013.

Entrée en scène du CSA

Le 10 septembre 2013, Aurélie Filippetti indique au Sénat que le gouvernement avait arbitré en faveur du transfert des pouvoirs de la Hadopi au CSA, comme le proposait le rapport Lescure. La mesure pouvait être intégrée par amendement à la loi sur l'indépendance de l'audiovisuel public, comme cavalier législatif, plutôt que dans la loi sur l'acte II de l'exception culturelle. Finalement l'amendement transférant la réponse graduée au CSA n'a pas été déposé devant le refus annoncé des sénateurs, mais il était à l'époque question que la mesure fasse l'objet d'un texte spécifique en 2014.

Vers un maintien de la Haute autorité

Promesse en douteDans une interview au Monde le 23 septembre 2014, alors qu'elle vient d'être nommée ministre de la Culture, Fleur Pellerin fait savoir sa volonté de maintenir la Hadopi que François Hollande avait promis de remplacer. Elle déclare :

Pour changer le statut de la Haute Autorité, qui surveille et réprime le téléchargement illégal, il faudrait passer par la loi… Pour moi, cette question institutionnelle ne préoccupe plus grand monde aujourd'hui.

Fleur Pellerin précise que "la réponse graduée est pédagogique, mais la priorité en la matière est la lutte contre la contrefaçon commerciale, et notamment le renforcement des moyens juridiques et policiers contre les plates-formes de piratage, en partenariat avec les institutions européennes et judiciaires".

Sur la Hadopi, lire notre focus Hadopi : Fleur Pellerin prend sa revanche sur Aurélie Filippetti

Un rapport sénatorial d'octobre 2015 préconise pourtant la suppression de la Haute autorité, jugée inefficace. "Les moyens de lutte contre le piratage à travers le mécanisme de la réponse graduée sont inopérants" selon le rapporteur du texte Jacques Mézard. Début novembre 2015, en commission, Fleur Pellerin répond en affirmant une nouvelle fois son soutien à la Haute autorité : "La Hadopi verra effectivement son budget conforté en 2016". La ministre souligne le maintien de la réponse graduée et son "efficacité pédagogique".

 

Défense de l'exception culturelle dans les négociations internationales

Dans le cadre des négociations UE-Etats-Unis sur un accord de libre-échange, la France obtient le 14 juin 2013 des Européens que l'audiovisuel en soit exclu. Cette décision suscite l'ire du président de la Commission européenne de l'époque José Manuel Barroso, qui dénonce alors un programme "réactionnaire" et "antimondialisation". Le 26 novembre 2013, lors d'une réunion ministérielle à Bruxelles avec ses homologues européens, Aurélie Filippetti propose un texte invitant l'Union européenne à se doter d'une "stratégie culturelle à l'ère du numérique" : défendre les subventions et les aides d'Etat pour la production culturelle. 

Aides au cinéma français

Le 15 novembre 2013, la Commission européenne adopte le nouveau cadre des subventions pour le cinéma et l'audiovisuel : les Etats et les régions pourront continuer à aider des oeuvres tout en exigeant que le tournage ait lieu sur leur territoire. La Commission voulait initialement réduire le lien entre aides et territorialisation.

Le 23 novembre 2013, elle fait savoir qu'elle a validé la nouvelle version de la taxe française imposée aux opérateurs des télécommunications pour financer la cinéma français. 

Le 8 janvier 2014, René Bonnell, passé par Gaumont, Canal+ et France Télévision, présente son rapport commandé par la ministre de la Culture sur le financement du cinéma français. Il suggère notamment de modérer les cachets excessifs [...] en incitant au partage du risque commercial. Il pose la question de la sortie éventuelle de films directement en vidéo et prône un assouplissement de la chronologie des médias. René Bonnell souhaite aussi remettre en place une riposte graduée contre le piratage,  avec des amendes dissuasives, progressives et "liées à la fréquence et à la gravité de l'acte délictueux".

Extension de la redevance

Le 3 octobre 2014, lors d'une visite au CSA, François Hollande plaide pour une extension de la redevance finançant l'audiovisuel public aux ordinateurs, tablettes et smartphones. Une idée à laquelle il ne se dit finalement "pas favorable" lors de la conférence de presse du 7 septembre 2015. Interrogée sur le sujet par le JDD quelques jours plus tard, Fleur Pellerin, ministre de la Culture, propose que l' augmentation de la redevance suive l'inflation et augmente d'un euro en 2016, tout en reconnaissant qu' "il faudra s'interroger dans le futur sur une réforme plus globale, adaptée à ces nouveaux usages" (...) "qui ne se résument plus à une télé dans un salon".

L'Assemblée nationale vote la suppression de la loi Hadopi...

Dans la nuit du 28 au 29 avril 2016, c'est dans un hémicyle pratiquement vide qu'un amendement écologiste prévoyant la suppression de la Hadopi à partir du 4 février 2022 est voté, à quatre voix contre trois. L'amendement à la loi sur les autorités administratives indépendantes, auquel s'était opposé l'exécutif, devait ensuite être voté par le Sénat.

...ressuscitée par le Sénat quelques semaines plus tard

Quasiment un mois après, le gouvernement réagit et introduit un amendement devant la commission des lois du Sénat. L'amendement voté par la commission avec l'aide de l'opposition, la suppression de la loi Hadopi n'est plus d'actualité. Le gouvernement se justifie ainsi : « depuis 2010, la Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des droits sur Internet (HADOPI) assure pleinement ses missions de mise en œuvre de la réponse graduée, de développement de l’offre légale et de régulation des mesures techniques de protection ».

 

Si la Hadopi n'a pas été supprimée, la défense contre la contrefaçon commerciale sur internet et la lutte contre le téléchargement illégal, elles, sont d'actualité. La volonté de légiférer sur "l'exception culturelle française" n'a pas non plus été suivie d'effets.

 

Calendrier en retard

Conformément à l'agenda du changement de François Hollande, la commission a été mise en place avant le 2 août 2012. En revanche, elle n'a rendu ses conclusions que le 13 mai 2013, alors qu'Aurélie Filippetti avait fixé le délai de mars 2013, pour une loi votée au premier semestre 2013. Le calendrier sur la fin de la coupure Internet n'a pas été tenu. La grande loi sur la création devait être présentée avant Noël 2013. Dans un entretien à Libération, la ministre de la Culture avait annoncé que la consultation interministérielle ne commencerait que fin janvier 2014. La loi relative à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine a finalement été promulguée le 7 juillet 2016. La Hadopi, elle, n'a pas été supprimée.

Type de promesse : Projet présidentiel

Mots-clés : numériqueHadopiEconomieInnovationinformatiqueculture