Proposer aux entreprises une baisse des charges et des contraintes si elles embauchent et améliorent le dialogue social
voeux de François Hollande pour l'année 2014, le 31 décembre 2013.
"Je propose un pacte de responsabilité aux entreprises. Il est fondé sur un principe simple : moins de charges sur le travail, moins de contraintes sur leurs activités ; et en même temps une contrepartie : plus d'embauches et plus de dialogue social. Une loi sera votée au début de l'année 2014 [...]"
Selon Le Figaro, cette annonce pourrait être une réponse de François Hollande au patronat, qui avait proposé fin octobre 2013 un "pacte de confiance pour la croissance et l'emploi". Celui-ci promettait la création d'un million d'emploi en cinq ans si les impôts et la dépense publique diminuaient. Initiée par le Medef fin octobre, la mesure a été signée par d'autres organisations patronales telles que l'Afep et CroissancePlus.
Lors de la troisième conférence de presse, le 14 janvier 2014, à l'Elysée, François Hollande déataille les grandes lignes de son pacte de responsabilité. Il s'organise en trois grands axes.
Les entreprises seront progressivement exonérées sur trois ans des cotisations sociales affectées à la politique familiale. Cela représente une perte de 30 milliards d'euros par an pour l'Etat, qui devront être financés par des économies de la dépense publique.
Lors de ses voeux aux forces économiques, le 21 janvier, le président annonce qu'il précisera quelle forme prendra cette exonération, lors de la grande conférence économique et sociale prévue au printemps 2014.
En parallèle de l'exonération progressive des cotisations sociales finançant la politique familiale, les entreprises connaîtront également un allègement des charges, a indiqué François Hollande.
"Nous fixerons un horizon – 2017 – avec une trajectoire de prélèvements obligatoires pour les entreprises. Mon objectif est aussi une diminution de taxes – qui parfois coûtent plus cher à recouvrer que ce qu'elles rapportent."
François Hollande a conditionné ces baisses des charges à des économies au niveau de l'Etat, "préalable à toute baisse d'impôts". Le président de la République a ajouté que ces baisses ne doivent pas "se traduire par un transfert de charges de l'entreprise vers les ménages, qui ne le supporteraient pas".
Les contreparties au pacte de responsabilité "porteront sur des objectifs chiffrés d'embauche, de travail des jeunes ou des seniors, la formation, les salaires et la modernisation du dialogue social". Le chef de l'Etat veut qu'un observatoire soit mis en place "et le Parlement y sera associé".
"Un document formalisera les engagements et les modalités de suivi des contreparties". Il devrait faire l'objet d'une loi votée à l'automne.
Promesse partiellement tenue de François Hollande
Début janvier 2014, le ministre de l'économie, Pierre Moscovici, précise que l'Etat "est prêt à agir" via "éventuellement un allègement de charges" si les sociétés investissent et embauchent. Le ministre du Travail Michel Sapin ajoute que le pacte de responsabilité concernera la fiscalité des entreprises mais aussi le financement de la protection sociale "qui pèse trop sur le travail". Lors de ces vœux aux forces vives, le 21 janvier, François Hollande a demandé "des contreparties claires, précises, mesurables" en termes d'emplois, avant de préciser que ces contreparties devraient porter sur "le nombre de créations d'emplois", leur "qualité", et les investissements en France. Dans un entretien au Monde, Jean-Marc Ayrault a réclamé des "contreparties sur un certain nombre de thèmes précis : la création d'emplois pour les jeunes et les seniors et la réduction de la précarité", et précisé qu'"à l'intérieur de chaque entreprise, il faut laisser la négociation jouer".
Les négociations, commencées en janvier 2014 à Maignon, ont finalement abouti, malgré le scepticisme des syndicats et le refus du Medef et del CGPME de s'engager sur toute contrepartie chiffrée en termes d'emplois, à un accord entre les partenaires sociaux, sans la CGT ni FO, le 5 mars 2014. Il prévoit notamment de "demander aux branches professionnelles" d'ouvrir "des discussions" ou "des négociations sur des objectifs quantitatifs et qualitatifs en termes d'emploi", dont un premier bilan pourra être tiré à l'été 2014. Cet engagement prendra la forme d'un relevé de décision, suivi par un observatoire national tripartite. En cas de non-respect des contreparties, les partenaires sociaux pourront demander à l'Etat de suspendre ou de modifier la trajectoire de baisse des charges.
Dans son discours de politique générale le 8 avril, le Premier ministre Manuel Valls a détaillé les mesures concrètes du pacte (ci-dessous), et confirmé un allègement du coût du travail à hauteur 30 milliards d'euros. Or selon les calculs du Monde, il s'agit en réalité de 41 milliards d'allègements de charges, en prenant en compte les 20 milliards du CICE (voir promesse dédiée). Un chiffre repris depuis par le gouvernement.
Sur les 41 milliards promis, les entreprises ont bénéficié d'une baisse de 24 milliards d’euros sur 2014-2015, en prenant en compte les 17 milliards d’euros de baisse de charges du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) de la même période. Fin 2016, ces baisses devraient totaliser 34 milliards d’euros puis 41 milliards fin 2017.
Faisant valoir que "l'emploi n'est qu'une conséquence de mesures d'allègement, de désasphyxie de l'économie française", son président Pierre Gattaz avait demandé début 2014 au gouvernement une baisse de 60 miliards d'euros d'impôts et de charges d'ici à 2017.
La suppression des cotisations patronales sur le Smic, dès le 1er janvier 2015.
Le dispositif "zéro charge", inscrit dans la loi de financement rectificative de la sécurité sociale 2014, article 2, est entré en vigueur le 1er janvier 2015. Il s'agit de l'extension de la réduction "Fillon", une baisse dégressive jusqu'à 1,6 Smic.
Selon plusieurs économistes, ces mesures amélioreront les marges des entreprises, mais ne seront pas suffisantes pour relancer la croissance et l'emploi. Le Medef a salué ces annonces, là où la CGPME prédit que "les grands gagnants" de ces mesures seront "les grands groupes". Les syndicats, FO et la CGT déplorent que le patroanat ait été "entendu et servi".
Le 16 avril, Manuel Valls a dévoilé quelques pistes pour économiser 50 milliards d'ici à 2017, 21 milliards de baisse de dépenses en 2015, puis 14,5 milliards chaque année en 2016 et en 2017. Il a notamment annoncé :
Dès septembre 2014, Michel Sapin, ministre de l'Economie, indique dans un entretien à l'AFP que l'objectif de réaliser 21 milliards d'économies de dépense publique en 2015 risquait d'être revu à la baisse, en raison d'une inflation trop faible.
Selon le programme de stabilité d'avril 2016, il y a eu 18,1 milliards d'euros d'économies en 2015 et 13,2 en 2016. L'effort le plus important, de 18,7 milliards d'économies, a donc été reporté à 2017. Or le montant d’économies constaté par la Cour des comptes, dans son rapport annuel sur les finances publiques de juin 2016, est très largement inférieur aux hypothèses retenues par le gouvernement : son examen conclut à une baisse réelle de 12 milliards d’euros en 2015.
Les grands axes du budget 2017 détaillés à l'été 2016 prévoit une hausse de 6,8 milliards d'euros des dépenses de l'Etat, et le ministère des finances a finalement reconnu que le plan de 50 milliards d'euros d'économies sur trois ans ne serait pas complètement tenu. Citant "une inflation zéro sur quasiment trois ans", Michel Sapin a également justifié cet abandon par la survenue des attentats.
Le gouvernement a dû "faire face à des dépenses supplémentaires dans le domaine de la sécurité, et c'était légitime".
Ces annonces ont divisé les élus socialistes. Certains soutiennent le gouvernement, quand d'autres se disent "atterrés" par ces annonces, "sur le fond comme sur la forme". Face à l'opposition d'une partie de la majorité sur ce programme d'économie, le gouvernement a consenti quelques inflexions, en faveur notamment des plus modestes, quelques jours avant le vote. Parmi elles, le "plan pauvreté" (voir promesse dédiée), qui prévoit une hausse du revenu minimum pour les personnes ayant de faibles ressources, sera appliqué au 1er septembre, et non décalé d'un an.
Le 29 avril 2014, l'Assemblée nationale a adopté par 265 voix pour, 232 contre et 67 abstentions, le programme de stabilité budgétaire prévoyant 50 milliards d'euros d'économies durant la période 2014-2017.
Au total, 41 députés du groupe SRC (socialiste, républicain et citoyen) se sont abstenus. Il s'agit alors de la fronde la plus importante au sein du groupe socialiste depuis l'arrivée au pouvoir de François Hollande.
Trente-cinq députés socialistes se sont à nouveau abstenus lors du vote sur le projet de loi de finance rectificative de la Sécurité sociale 2014, qui contient les premières mesures. Trois d'entre eux ont même demandé la "suspension immédiate" de ce pacte, dans une lettre ouverte à Manuel Valls à l'été 2014. Dans le JDD, Manuel Valls leur répond et assure qu'il est hors de question de changer de politique économique.
Le premier ministre Manuel Valls a lancé, le 4 novembre 2014, le "Comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements", présidé par Jean Pisani-Ferry, commissaire général de France Stratégie. D'après les propos recueillis par Le JDD, à ce comité "siégeront les partenaires sociaux mais aussi deux députés et deux sénateurs pour porter la parole de la représentation nationale." Ce comité remplace l'observatoire prévu par François Hollande.
Le journal La Croix estime que l'objectif de Manuel Valls est de rappeler aux patrons les efforts consentis par les contribuables et de relancer les négociations de branches. En mars, patronat et syndicats ont convenu qu’il reviendrait aux branches professionnelles de négocier les contreparties au pacte en termes d’embauches, de formation ou d’investissement, et ces négociations patinent.
Selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) en décembre 2015, le CICE a permis de créer ou de sauvegarder près de 120.000 emplois, mais il a aussi été utilisé pour augmenter les salaires, ce qui n’était pas son objectif initial. Loin des 500.000 espérés par le gouvernement, devenus 200.000 en juillet de la même année par le ministère de l'économie. Mesurer l'impact sur les créations d'emplois se révèlerait pourtant impossible, selon le rapport avorté du Sénat qui aurait dû être publié le 15 juillet.
Dès juin 2014, la députée PS et rapporteure générale du budget, Valérie Rabault avait prévenu que le plan d'économies proposé par le gouvernement "pourrait entraîner la suppression de 250 000 emplois à l'horizon 2017". Des craintes également exprimées par le Haut conseil des finances publiques et par la fondation libérale Ifrap, qui évaluait que le pacte permettrait de créer au mieux 80 000 emplois.
Malgré les appels répétés de François Hollande lors de la conférence sociale (voir promesse dédiée) du 7 juillet 2014 et dans une interview au Monde un mois plus tard adressés au patronat pour qu'il "[s'empare] du sujet de manière urgente et aboutir à de vrais résultats". Mais en septembre, le ministre du travail François Rebsamen a annoncé que seules 33 des 50 plus grosses branches avaient commencé à travailler. Or ces négociations conditionnent la mise en œuvre du pacte de responsabilité. Emmanuel Macron, laors ministre de l'économie, a même pointé la responsabilité de Pierre Gattaz dans l'échec du pacte de responsabilité, à la veille d'une journée de mobilisation à l'appel du Medef contre la politique économique du gouvernement, dans une interview donnée le 2 décembre 2014 sur Radio Classique.
Près d'un an plus tard, "seules 14 des 50 branches qui emploient le plus ont conclu un accord", regrettait Manuel Valls lors de la 4e conférence sociale en octobre 2015. "Trop peu" d'engagements, selon lui, en échange des aides obtenues dans le cadre du pacte de responsabilité. Le Medef comptait lui, en janvier 2016, 56 branches sur les 78 adhérentes au Medef qui avaient signé un accord avec les syndicats ou proposé un relevé de conclusions, selon le chiffrage établi par l’organisation patronale et communiqué au JDD. Des "pseudos-accords ne sont qu’une refonte de négociations obligatoires ou déjà engagées", pour Pascal Pavageau, négociateur de FO.
M. Valls a jugé le 15 février 2016 que les engagements du patronat en matière d’emploi n’étaient "pas satisfaisants" et menacé de conditionner les aides aux entreprises accordées dans le cadre du pacte de responsabilité.
Le taux de marge des entreprises a légèrement augmenté entre 2014 et fin 2016. Selon l'Insee, au deuxième trimestre 2016, le taux de marge a baissé de 0,4 point, retrouvant presque son niveau de fin 2015 (31,7 %). Début 2014, il avoisinait les 30 %. L'Insee attribue cette hausse "surtout" au "recul des prix de l'énergie", et estime que le CICE a amélioré le taux de marge des sociétés non financières de l’ordre de 0,9 point en 2014.
Dans l’industrie, le coût du travail est passé sous le niveau allemand, avec 37,80 euros contre 39,10 euros outre-Rhin. "C’est clairement l’effet CICE", selon Bercy. Pour Elise Coudin, la responsable de l'étude de l'Insee "Les entreprises en France", "la progression du coût du travail en France est modérée depuis 2012 grâce à l'entrée en vigueur du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE)".
Selon l'Insee, l'investissement total a reculé en France de 1,6% en 2014, après un recul de 0,8% en 2013, diminué légèrement, de 0,2%, en 2015 et augmenté de 1,6 % au premier trimestre 2016. Selon France Stratégie, le CICE n’était pas toujours d’une ampleur suffisamment importante pour être un "élément déterminant dans les décisions d’investissement" en 2014. "Plutôt que de refaire leurs marges, certaines entreprises ont en partie répercuté les bénéfices du CICE sur les salaires. C’est favorable à la consommation mais moins à l’investissement », regrette l’économiste Jean-Pisani-Ferry, commissaire général de France Stratégie, organe de réflexion lié à Matignon.
Promesse en cours
Type de promesse : Annonce de mandat
Thèmes : Economie, industrie, fiscalité et finances publiquesSocial, travail, fonction publique et services publics
Mots-clés : pacte de responsabilitéchômageentreprisesembauchesdialogue socialbaisse des charges